Chacun·e s’accorde aujourd’hui sur la place prééminente qu’occupent l’informatique et les réalisations qui en découlent dans nos sociétés. Pratiquement tous les domaines de l’activité humaine ont été profondément impactés, transformés, remodelés par cette science et ses développements. Pour autant, l’informatique en tant que discipline d’enseignement reste jeune. Sa place dans les curricula, son statut, ses contenus, la formation de ses enseignant·e·s…, tous ces éléments varient grandement d’un pays à l’autre, d’une région à l’autre, en fonction de choix politiques, sociaux ou économiques.
La conférence Didapro s’intéresse depuis ses débuts à l’enseignement et à l’apprentissage de l’informatique et on peut mettre en lumière un certain parallélisme entre l’évolution du statut de l’informatique dans le domaine de l’éducation et l’évolution de cette conférence.
Dans les écoles, les premières expériences avec des ordinateurs sont réalisées dès les années 70. Ceux-ci ne disposent pas encore d’interface graphique et leur usage est réservé à des spécialistes qui ont acquis des bases de langages de programmation. Durant cette période, les premières conférences de didactique de l’informatique, réalisées alors sous l’égide de l’Association Francophone pour la Didactique de l’Informatique (AFDI), concentrent leurs réflexions sur l’enseignement de la programmation.
Les années 80 ont vu les ordinateurs personnels arriver en masse sur le marché, avec une baisse très importante de prix. Dans les années 90, les interfaces graphiques se sont généralisées, les rendant accessibles au plus grand nombre tandis que les outils bureautiques étaient utilisés en dehors du monde professionnel. En milieu scolaire, l’informatique est devenue un outil de production et de communication, un support aux apprentissages des élèves dans les diverses disciplines. Ensuite, les réflexions sur l’apprentissage des logiciels sont passées au premier plan. Les conférences ont alors pris, au début des années 2000, le nom de « Didapro », pour « didactique des progiciels ». La conférence de Patras en 2011 a élargi la thématique à la didactique des Sciences et Technologies de l’Information et de la Communication (STIC), d’où le nom de « Didapro – DidaSTIC ».
Plus récemment, l’approche qui voudrait résumer l’informatique scolaire à l’usage d’outils a été mise en question. Cet usage d’outils, dénué des fondements conceptuels qui les régissent, est insuffisant pour amener les enfants à mieux comprendre le monde qui les entoure. Un mouvement vers l’introduction d’enseignement de l’informatique à tous les niveaux, en tant que discipline à part entière, a vu le jour dans de nombreux pays. Nos deux dernières conférences ont assez largement consacré ce mouvement en faisant porter une partie importante de leurs réflexions sur ces problématiques.
Plusieurs propositions de structuration de ce large domaine de l’éducation à l’informatique sont possibles. L’une d’elle se fonde sur une représentation autour de trois attracteurs. Le premier est constitué de l’informatique en tant que discipline scientifique, le deuxième est lié à la transmission d’une « culture technique », le troisième attracteur se focalise sur les utilisations généralisées d’instruments « numérisés », contribuant à une « culture numérique » et intégrant des thématiques liées à l’appropriation des médias numériques (« éducation aux médias »). Une autre proposition repose sur une répartition en trois piliers : le premier embrasse les concepts et notions fondant l’informatique comme discipline scientifique ; le second vise à l’appropriation d’une technique d’utilisation d’outils numériques, alors que le troisième pilier est formé des connaissances et réflexions relatives aux médias numériques.
Ces représentations, proches, mais distinctes, non-exclusives, constituent autant de tentatives de classification ayant pour but d’offrir une intelligibilité améliorée des éléments composant le domaine de l’éducation à l’informatique.
Elles soulignent la distance les séparant et permettent de poser différemment les problématiques comme celle des objets de savoir, de la formation et du profil des enseignant·e·s amené·e·s à les enseigner.
La première conférence de l’Association Francophone pour la Didactique de l’Informatique, ancêtre de Didapro, en 1989, proposait des articles scientifiques avec des intitulés tels qu’« Enseignement de méthodes de programmation dans l’initiation à l’informatique », « L’apprentissage de la programmation » ou encore « Des univers et des outils variés pour commencer à programmer ».
Nous pourrions fort bien imaginer qu’il s’agit de titres d’articles présentés à Didapro 7 en 2018 ! Si c’était le cas, cela indiquerait que certaines questions persistent, sans toutefois signifier que nous sommes dans le cadre d’une sorte d’éternel retour : on pourrait plutôt penser à une sorte de spirale semblant nous avoir ramené·e·s à notre point de départ, alors que nous sommes monté·e·s d’un ou de plusieurs crans. La conférence Didapro 2018 vise à analyser les évolutions qui sont intervenues depuis les années 80 et à discuter les résultats de recherches récentes. Les thématiques (non exhaustives) choisies pour cette conférence sont les suivantes.
Informatique : définition de l’objet
Comment définir la discipline « informatique » ? Existe-t-il aujourd’hui un consensus pour en établir les contours ? Qu’est-ce qui en fait partie ou non ? Comment représenter les différents aspects de ce domaine ? Comment les différencier et comment sont-ils reliés ? Quelles évolutions dans l’enseignement de l’informatique depuis les années 90 ?
Politiques éducatives, cursus scolaires et curricula en informatique
Quelle est la place de l’enseignement de l’informatique dans les différents pays ou régions ? Quels sont les résultats des expériences en cours ? Au niveau des contenus, qu’est-ce qui doit être enseigné dans les différents degrés ? Si l’informatique ne devait pas se réduire au seul enseignement de la programmation, quels sont les autres aspects à prendre en compte et comment les aborder avec les élèves ?
Quel·le·s enseignant·e·s pour quelle informatique ?
Question de la formation. Comment organiser la formation des élèves en informatique dans les différents degrés ? S’agit-il de disposer d’enseignant·e·s spécialistes formé·e·s en informatique au niveau universitaire pour enseigner dès le niveau primaire ? Au contraire, faut-il former l’ensemble des enseignant·e·s généralistes à l’informatique afin qu’ils ou elles l’enseignent eux-mêmes ou elles-mêmes ? Quel est l’état des lieux de la situation dans les différents pays, quels sont les problématiques rencontrées et les résultats obtenus ?
Dispositifs pour l’enseignement de l’informatique
Robots, drones, imprimantes 3D, objets connectés. De nombreux outils sont en train de voir le jour. Quels sont leurs apports pour l’enseignement de l’informatique ? Y a-t-il d’autres dispositifs innovants qui permettent d’aborder la discipline sous un autre angle ? Ou au contraire, faut-il se contenter d’enseigner l’informatique avec le couple « papier-crayon » ? Que nous disent ces dispositifs variés sur les fonctions d’enseignement-apprentissage mises en oeuvre pour l’informatique?